Dimanche dernier, au Salon du livre, j’ai assisté à plusieurs tables rondes et discussions intéressantes aussi.
La première table ronde à laquelle j’ai assisté s’appelait « Raconter l’histoire » et réunissait 3 romanciers qui écrivent des romans historiques, Jean-Pierre Charland (aussi professeur de didactique de l’histoire), Louise Chevrier (chercheure) et Michel Langlois (qui a fait carrière en généalogie). Ils ont parlé des thèmes suivants :
- La différence entre les faits et la fiction, et la place des faits dans la fiction historique : Louise Chevrier dit aimé spécifier à ses lecteurs où elle triche avec la réalité pour raconter une bonne histoire, comme lorsqu’elle invente un personnage.
- Le défi du roman historique : construire une bonne histoire sans donner un cours d’histoire. Ça veut souvent dire en connaître beaucoup sur les détails de la vie quotidienne en d’autres temps.
- L’importance de trouver un angle et l’obligation de prendre partie à certains moments…
- Ne pas trahir l’époque dont on traite mais trouver de bons moyens de rejoindre les lecteurs d’aujourd’hui.
Ces écrivains étaient de toute évidence des passionnés de leur travail et ont aussi eu l’air d’avoir du plaisir à participer au débat.
Une autre table ronde avait un sujet vraiment différent et l’atmosphère et le niveau d’engagement des personnes se manifestaient autrement. Ça avait l’air moins spontané et plus scripté, mais le sujet était quand même intéressant pour moi. On y parlait de la pertinence de la publication des revues dans l’ère de l’électronique. Mais on ne parlait pas de n’importe quelles revues, mais de niches très spécialisées de revues qui présentent un amalgame de reportages, de littérature, d’essais, allié à un grand souci esthétique dans la présentation. Les trois publications qui étaient représentées étaient Feuilleton, Liberté, et Nouveaux Projets, dont je n’avais jamais entendu parler. On était vraiment dans l’équivalent « revue » du « slow food », et non dans la lecture comme acte de consommation rapide d’informations éphémères. Gérard Berreby, éditeur de Feuilleton, parlait de raconter des histoires pour donner du sens et faire réfléchir plutôt que de la pure transmission d’information.
J’ai écouté une entrevue de deux auteurs (les journalistes Richard Hétu et Alexandre Sirois, de La Presse) qui ont publié un livre sur la politique américaine qui discute des facteurs influant sur les résultats des élections présidentielles. C’était plutôt d’actualité.
Il y avait aussi un panel avec 5 auteurs de polar de la Série noire de Libre Expression : Jacques Savoie, Mario Bolduc, Johanne Seymour, Geneviève Lefebvre, et David S. Khara. Ils ont décrit la nature du polar actuel, non seulement une bonne histoire du suspense, mais il s’y mélange maintenant aussi beaucoup d’autres éléments dont la critique sociale ou politique. Des auteurs nous font aussi beaucoup voyager. Ils ont parlé de l’importance de la structure du récit, de bien créer la chute, et de maintenir la tension pour garder l’intérêt du lecteur. Plusieurs avaient une expérience de scénariste, qui leur sert assez bien dans leur métier d’écrivain : on ne garde de la structure que ce qui est essentiel pour faire avancer l’action. On doit épurer le reste.
Une des raisons qui m’avait amené à retourner au salon durant la fin de semaine était la présence de Normand Mousseau, prof de physique à l’UdeM et auteur de plusieurs ouvrages de nature critique dont un sur les gaz de schistes et dont le nouveau livre parle de l’industrie minière. J’ai donc acheté ledit livre, Le défi des ressources minières qui promet d’être intéressant. Il a discuté du livre dans un bref panel en compagnie d’Alain Deneault, un philosophe de l’UdeM, qui lui a publié Paradis sous terre qui parle du Canada comme étant « la Suisse des minières », autrement dit en tant que paradis fiscal des minières opérant à l’extérieur du Canada et commettant ailleurs des crimes pour lesquelles elles ne peuvent être poursuivies ici. Le sujet semble plutôt incendiaire. L’auteur a parlé dimanche d’une « anthologie des horreurs » : corruption, pillages, collusion, meurtres, etc. Au Canada, il critique les ententes inéquitables signées avec les communautés locales et les groupes autochtones pour faciliter l’exploitation des ressources minières. Il fait ici le lien avec le Plan Nord (dont Normand Mousseau dit que ça n’est pas un plan, mais une annonce publicitaire) qui pour lui ne sera jamais à notre avantage. Bien hâte de lire le livre pour voir tout l’argument. Venant d’un philosophe qui enseigne la pensée critique, ça promet. Alain Deneault est mieux connu pour avoir écrit Noir Canada (avec le même complice que Paradis sous terre), maintenant retiré de la circulation au Canada suite avec une entente hors-cours avec Barrick Gold qui les poursuivait pour diffamation.
Ça fait pas mal le tour des faits saillants de la fin de semaine… Plus instructif et plus le fun qu’une semaine à l’école, fertile en rencontres inoubliables. Je ne vous ai pas parlé de ma rencontre avec Michel Tremblay parce qu’on ne peut rien en dire.
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